Un des attraits du hobby philatélique est de faire des découvertes surprenantes lorsqu’on se plonge dans un lot ou une collection. Un des sujets qui permet d’en faire est certainement celui des millésimes des timbres employés dans les bureaux français au Maroc et pendant le protectorat français dès 1914. Le millésime permet de distinguer l’année de tirage d’un timbre qui sert sur plusieurs années comme c’est souvent le cas pour les séries dites courantes. Il est aussi une mesure de lutte contre la fraude instaurée par la poste française dès 1891 avec la série au type Sage.
Le type Mouchon
Le type Mouchon est employé dans les bureaux français au Maroc dès 1900 avec une surcharge en CENTIMOS (espagnol) en replacement de la série au type Sage (Paix et Commerce). Le 10c Mouchon surchargé 10c CENTIMOS est mis en circulation en décembre 1902.

A partir de 1911, l’énoncé de la monnaie de la surcharge se fait en caractères arabes (sentim pour CENTIMOS, bisita pour peseta et bsatit pour pesetas).

Le 1er Aout 1914, la série en cours depuis 1911 avec la surcharge arabe, reçoit la surcharge « PROTECTORAT FRANCAIS ». La série sera retirée courant 1921.

Une variété rare
Différentes sources permettent d’établir une liste des millésimes du 10c employé depuis 1902 ( 10 Centimos Millésime 1) à 1921 (surcharge arable + Protéctorat Français).
Avant le protectorat, selon le catalogue Maury (ref. 1) , sont connues les millésimes 1, 2, 3 et 4. Benatar et Guigue (ref. 2), confirment les mêmes tirages.

Et pour la période Protectorat, les millésimes 4, 7, 7 (Grande Consommation) et 9.

Le panneau ci-dessous ne pourrait être de 1909 puisque la surcharge arabe n’est apparue qu’en 1911. Il s’agit donc d’une variété du timbre sans la surcharge « PROTECTORAT FRANCAIS ».



L’inscription de contrôle G28010 13 indique que la date de tirage est le 28 Octobre. Sauf erreur de ma part, le G indique la machine employée pour l’impression et le 13 l’identifiant de l’opérateur de la presse. La marque de contrôle (croix) est aussi présente sous le timbre 146 de la planche.
Le catalogue donne aussi l’indication qu’il « existerait » un tirage du 10c en 1919 au millésime 9 sans la surcharge en langue française.

Dans la bibliographie
Le catalogue Cotter (ed. 1967) référence cette variété sous 41i (sans surch. Protectorat, GC) avec une forte côte (100dh contre le 41 à 0.4dh).
Benattar & Guigue dans leur ouvrage de 1930 Les Timbres Postes du Maroc, classent cette variété sous la référence 43e avec le même intitulé et établissent une côte de 100 FF.
Les Comtes Exelmans et De Pomyers, dans leur livre Maroc Postes Françaises, mentionnent aussi l’existence d’une telle variété:

Conclusion
La variété est connue et il est possible même de distinguer un timbre de ce tirage (sans la surcharge française) grâce à son papier et sa gomme par rapport à un tirage antérieur à 1914. Trouver une telle pièce en interpanneau est inespéré et difficile à apprécier car pour le moins unique. Reste que l’on peut se poser la question de ce défaut de surcharge: est-ce par oubli dans le contrôle des planches, un surplus non détruit qui se retrouve entre les mains de marchands de l’époque, ou par intention de spéculation que quelques planches se volatilisent ?
Références:
- Catalogue de cotations de Timbres de l’ex-empire français d’Afrique 2010/2011 – Editions A. Maury – France
- Les Timbres-Poste Du Maroc: Étude-catalogue Des Timbres Des Postes Locales, Chérifiennes, Françaises, Et Étrangèrs Employés Au Maroc.- Benatar, M, and L.-A Guigue. – Amiens: Yvert & Cie, 1930. Print, 151 pages.
- Catalogue spécialisé de timbres postes Cotter Maroc 1967 – 8ème édition
- Comte O De Pomyers, Comte Exelmans: Maroc Postes françaises, 1948, Editions Yvert & Tellier, (155×225) 225 pages